Clôture de Régis Passerieux, secrétaire général : présentation des axes de travail 2018

Nous voici au commencement aujourd’hui.

Pourquoi ? Parce que c’est le moment : il y a un appel pressant et nouveau : L’effondrement des appareils politiques que nous venons de vivre en France n’était qu’une étape, qu’un symptôme de ce qui est en train de se produire dans ce moment particulier. Il y a une sensibilité à fleur de peau. Elle est là parfois en nous mais elle est aussi, et surtout, dans le peuple, dans la population. Je ne sais pas si vous sentez, si vous ressentez cette sensibilité actuelle. En tout cas, il nous faut la saisir non pas avec notre rationalité, mais avec notre cœur. C’est elle qui dicte, qui pose les questions.

La société française a soif

La société française a soif, soif de fond, soif de sens. Il faut bien apporter quelque chose à cette soif, y répondre. Les français ont soif ; ils sont dans un sentiment de solitude, d’incertitude de servitude aussi. Je dis les français, mais aussi une bonne partie des peuples européens.

Cela ne veut pas dire qu’il n’y a pas de conscience dans les peuples actuellement. Ils ont parfaitement conscience, les français, les peuples européens, de subir une aliénation croissante, une perte de repères, d’être enfermés chaque jour un peu plus, comprimés dans un individualisme asséchant et harassant. Ils servent un système qui leur demandent chaque jour un peu plus, pour se formater dans leur travail, dans leurs relations, dans leurs loisirs, dans leurs échanges, dans leur être : surendettement, surconsommation, surexploitation du monde, surinformation. Ils sont sommés de se surpasser chaque jour un peu plus ou de n’être plus rien ; Etrange alternative que d’ailleurs notre propre Président de la République a énoncé d’une manière étonnamment sincère dans la description de ce qui se passe.

De n’être plus rien ? Des territoires perdus, des citoyens de seconde zone, des déracinés expulsés de la société du spectacle, rejetés vers le vide, perdus pour la bataille d’une croissance qui ne vient, en fait, jamais réellement. Ils sont mentalement, spirituellement, épuisés, dans un monde qui lui-même est physiquement épuisé.

Mais cette conscience c’est aussi une soif d’autre chose, il ne faut pas être pessimiste : soif d’une intelligence du travail, soif d’un juste entreprenariat, implication dans des communautés de projet fraternelles, qui leur donnent, et nous donnent tous, une place l’un par rapport à l’autre. Soif d’espaces de relation, d’une forme de loyauté dans les liens, d’une économie respectueuse du monde, des territoires, d’une valorisation de l’engagement : en somme d’autres règles du jeu et d’autres règles de vie.

Trois absurdités à conjurer

Et bien, face à cela, il nous faut conjurer trois absurdités qui sont en train d’émerger. Parce que nous ne sommes pas dans un monde théorique. Nous sommes dans un monde réel où se meuvent des forces.

Trois absurdités qui sont :

L’une, la première, la volonté d’accélérer cette course effrénée. Au fond, la solution à cette incomplétude cela serait d’aller encore plus vite, de se conformer encore plus, de se formater encore plus : une sorte de fuite en avant, « technico-politique ». C’est le projet qui est mené actuellement, avec une certaine forme de sincérité, par ceux qui nous gouvernent.

Il y a une deuxième absurdité. C’est de se jeter dans une colère révolutionnaire « tripale », rétroactive, dans laquelle on restaurerait les mânes d’une insoumission atavique. On sait où cela a mené. On sait que c’est la sécularisation de soifs spirituelles, et qu’elle finit forcement dans une impasse, parce que l’être humain est trop petit pour la contenir.

Et la troisième impasse, c’est le refuge dans des pulsions identitaires. Et on comprend que dans une société atomisée comme la nôtre, dans laquelle des gens sont dans une cruelle souffrance, mentale, physique, de proximité, excepté dans le cœur de quelques métropoles (et encore !), on sait bien, que cette impasse identitaire est une tentation. Elle peut prendre plusieurs formes : cela peut être une identité nationale complétement mythique ; cela peut être une identité archaïque ; cela peut même être une identité spirituelle. Mais ce sont des refuges parce que ces identités recréent des frontières presque à l’intérieur des êtres humains ; si cette voix-là est compréhensible, doit être entendue, elle est une troisième absurdité.

Ces deux dernières absurdités peuvent l’une ou l’autre gagner dans le contexte dans lequel nous sommes.

Bien heureusement, il y a une sagesse encore dans la population française et dans la population européenne ; elle prédomine encore. Je dis « encore », parce que cette résilience, c’est une richesse et un trésor, de nos vieilles sociétés et de leur héritage de sagesse, de connaissance.

Ces pépites, ce ne sont pas du tout des pépites intellectuelles produites par l’élite ; elles sont au contraire aujourd’hui, souvent, issues d’une sagesse populaire, dans l’inventivité des territoires, le local.

Ce sont ces perles qu’il va nous falloir faire prospérer. C’est le travail qui est devant nous.

Je voudrais le simplifier avant d’aller maintenant dans la méthode, parce qu’il faut être clair à la fin de cette si riche série d’interventions, parfois contradictoires, qui je le crois portaient la même soif, avec des réponses divergentes.

Il faut essayer de simplifier le champ de notre travail, et en même temps de bien comprendre quel est notre projet collectif, que l’on va affiner tout au long de l’année qui vient, et quels en sont les piliers, quelles en sont les trames fortes.

Un socle, un préalable : une société de liens et de relations

D’abord, on l’a dit, il y a une toile de fond, un socle, je dirai presque « non négociable », qui est l’écologie humaine : le préalable. On ne construit pas pour une économie, on ne construit pas pour un progrès abstrait ; on construit pour une société de liens et de relations.

Et donc, le préalable à tout, le préalable à la construction y compris, on va le voir, en économie, le préalable c’est une société dense et riche de relations entre les hommes, et entre les hommes et leur mère nourricière. C’est pour cela que l’on parle d’« écologie humaine ».

Nous devons parler de la famille, de sa solidité, ainsi que l’a fait hier Georgina Dufoix ; de nature ; des espaces de don. L’homme n’est pas un outil mécanique ou une machine connectée : nous devons retrouver des espaces de gratuité non marchands, grâce auquel la société ne se trouve pas entraînée.

Tout ce qui façonne, standardise l’être humaine, quelle que soit son origine, des machines, des projets politiques ou des sociétés privées, doit être combattu et récusé. C’est le préalable à toute possibilité d’agir réellement pour défendre la société.

Cela veut dire bien sur beaucoup de travail sur la manière dont il faut faire cela :

Quel peut être le rôle d’un Etat pour recréer des liens ? C’est un vrai sujet, c’est une vraie question. Nous sommes actuellement dans une mécanique dans lequel on demande à un Etat « techno-puissant » de s’armer encore pour aller couper en petits morceaux ce qui fait lien dans la société et formater celle-ci au monde.

Ce n’est pas un projet souhaitable. Nous devons au contraire défendre la vision d’un Etat totalement imbriqué dans la société.

L’Etat, ce ne sont pas des technocrates au sommet qui définissent et qui régissent, après un moment démocratique ponctuel, parfois détourné par des systèmes médiatiques très concentrés.

L’Etat, c’est une vie commune, du local au local et à l’international ; et c’est quelque chose qui doit faire respirer la société, qui doit l’abreuver.

Il ne l’a fait finalement que dans une période restreinte, entre 1945, comme l’a dit récemment Philippe de Roux sous l’impulsion du Conseil National de la Résistance, et jusqu’à 1973. A partir de ce moment-là de violentes forces se sont mises en place : des forces venant de Nations puissantes, des forces internationales, des forces d’épargne financière, qui ont voulu instrumentaliser les Etats pour faire fructifier le capital accumulé par une génération ou concentré dans certaines nations.

Et bien, pour notre part, nous voulons être sur ces sujets fermes et claires, et poser des jalons. C’est pourquoi nous voulons que l’on dise non au CETA (nb : traité commercial signé entre l’UE et le Canada, actuellement en cours de ratification par les parlements nationaux) et que nous devons nous opposer à toute forme d’accord international qui puisse demain, en détournant un droit flexible dans des antichambres, détruire des équilibres biologiques, des systèmes de relations.

Nous devons bien plus que de « transition énergétique » appeler à un « bouleversement énergétique », immédiat.

Nous devons définir des priorités : nous devons dire non à une concentration des pouvoirs dans les « GAFAs ». Pourquoi ? Parce qu’il est inimaginable que des systèmes ainsi concentrés puissent formater les gens et les sociétés. La richesse de l’intelligence héritée par ces firmes, Apple, Amazon et les autres, ce n’est pas une richesse d’intelligence créée par une seule génération de chercheurs à un temps donné, en quelques années, par des « génies ». C’est l’héritage de générations qui ont travaillé sous l’ère industrielle : il s’est trouvé capté à un endroit, grâce au financement aux Etats-Unis de systèmes de recherche, et soudainement développé. Mais cela ne leur appartient pas ; c’est un patrimoine commun. Elles n’ont pas tout inventé. Elles ont hérité, capté l’héritage. Pour faire face à cette captation, il faut des Etats, des nations, des institutions, et des communautés qui puissent dire non.

Première base, premier fondement donc : d’abord et avant tout, la société.

Un deuxième axe : le moteur de l’économie de la réciprocité

Deuxième piste et deuxième fondement, qui nous réunit, c’est le moteur : il nous faut bien sur une économie.

ar l’homme créée, l’homme vit. Nous sommes dans la chair et dans le sang, et nous devons extraire des difficultés quotidiennes des pans entiers de la population. Nous avons à coté de ce préalable de l’écologie humaine, à cet égard, aussi un axe clair : l’économie de la réciprocité.

Cette économie de la réciprocité, elle est une rupture avec tout le système économique et financier tel qu’il fonctionne depuis 35 ans, qui a été imposé comme idéologie dominante.

C’est un sujet majeur que d’y opposer un autre projet économique.

Comme l’ont énoncé hier, à l’occasion des tables rondes, Bruno Roche et Pierre-Yves Gomez, nous avons aujourd’hui des outils dont nous savons qu’ils sont dans le champs du possible.

Il ne s’agit pas de prôner et de défendre la décroissance pour la décroissance. Il s’agit d’avoir une nouvelle conception de la richesse, de la gouvernance des entreprises, de la répartition, et de l’entreprise elle-même comme un lieu de création collective respectueuse des hommes, des biens et du monde.

Et nous proposerons des choses très concrètes que nous allons travailler à l’occasion d’une prochaine convention thématique : Bruno Roche et ses équipes ont démontré depuis 7ans que si les entreprises investissent dans les relations dans leurs territoires, dans leurs sous-traitants, leurs fournisseurs, dans les villes, les régions et pays dans lesquelles elles sont implantées, dans le respect de leur environnement, dans la densité sociologique qui les environne, les richesses qu’elles créent sont supérieures. Les Etats doivent encourager très fermement ces entreprises à le faire, par des systèmes fiscaux discriminants, par des règles et des normes très précises : c’est tout à fait possible même dans un système commercial ouvert à l’international ; c’est possible ici et maintenant, en France.

C’est la même chose pour l’organisation du travail. Nous savons que nous allons basculer dans un monde différent avec les nouveaux systèmes d’information. Les Etats ont là aussi à inventer des règles nouvelles de respect de l’« intelligence du travail ». Peut-être pas un revenu universel, mais peut être un revenu d’activité, car l’on voir bien qu’il y a des formes de travail qui ne sont pas comptabilisées, ou mobilisées.

Cette démarche, cette nouvelle économie, elle va se heurter à des forces extrêmement violentes. Nous devons être réalistes, extrêmement réalistes. On nous exposait hier la concentration des forces économiques, la concentration des médias, et il y a y compris des Etats, puissants qui n’ont pas intérêt, dans les rapports de force internationaux, à ce que les choses changent.

Et donc, nous allons devoir réellement nous mettre au travail pour être capables de proposer des choses qui soient transposables et organisables ici, directement, dans notre société, sans attendre. Ce qui a été un leurre depuis des décennies, c’est l’attente d’une régulation abstraite de la mondialisation qui devrait, comme ça, permettre d’éviter à avoir à prendre nos responsabilités, ici et maintenant.

Troisième dimension de notre travail : une nouvelle méthode politique

Un socle, l’écologie humaine, un moteur, l’économie de la réciprocité…, et troisième dimension, une nouvelle méthode politique.

Nous avons un choix qui est très clair et très fort : c’est celui de s’appuyer sur des communautés de projet.

On considère aujourd’hui qu’il faudrait opposer le local, les territoires, à la nation et à l’Europe, que ce sont trois dimensions qui se concurrencent et qui se heurtent entre elles. Il ne faut pas le considérer ainsi et avoir cette topographie mécanique. Les communautés de projet et d’idées sont imbriquées. Pascal Ollive le disait tout à l’heure en faisant le rapport sur les enjeux démocratiques : la France n’a jamais vécu de manière isolée.

Je voudrais que l’on imagine notre nation non pas comme un système géométrique avec un Etat au sommet, des pyramides, des hiérarchies verticales mais comme un être biologique, une cellule vivante. Cette cellule vivante, elle vit d’échanges d’énergie avec l’extérieur de manière permanente, elle se renouvelle à l’intérieur de ses tissus de manière continue. Ces tissus intérieurs, ce sont toutes les communautés de projet, spirituels, matériels, les territoires, les villes, les entreprises, qui communiquent entre elles et qui prospèrent quand elles échangent de plus en plus.

Nous devons dans la méthode politique faire, et Jean Vanier nous l’a dit quand nous l’avons rencontré, que chaque fois qu’il y a de la bonne matière qui se créée, de bons échanges qui se démultiplient, nous soyons capables de les faire fructifier, de les rendre réciproques, de créer des effets miroirs, en les faisant croître.

Le système est en crise. Il se nécrose. Parce que de l’extérieur ont veut lui imposer des règles qui ne sont pas celle sa vie propre. On pourrait se dire : si nous arrivons à durcir la membrane, autour, nous allons protéger ce système. Mais c’est impossible : toute cellule échange avec l’extérieur, reçoit de l’énergie, de l’information, et en renvoie. Une membrane qui serait solidifiée, une nation qui se fermerait, elle se briserait mécaniquement et irrémédiablement.

Donc notre travail, le travail politique que nous devons faire dans la méthode propre que nous allons construire, c’est au contraire d’avoir une autre vision de l’Etat, une autre vision de la politique, une autre vision du travail, pour faire que cette cellule interne, notre nation, soit plus forte, se renforce, se solidifie dans la solidarité, dans un esprit de communauté, dans la relation.

Et, dès lors, le problème du rapport à la mondialisation, le problème de la construction de l’Europe, se posera de manière tout à fait différente. Parce que nous serons fort en nous même, par nous-même, pour échanger et pour nous construire.

C’est tout l’enjeu de la méthode politique que nous allons édifier et développer.

C’est vrai, Lord Glasman l’a dit tout à l’heure, qu’il faut comprendre une vision anglaise différente sur l’Europe. Moi, je voudrai à ce sujet faire un petit « outing », comme l’on dit : j’ai voté non au référendum de 2005 sur la constitution européenne. Ce n’était pas facile : je venais de quitter mes responsabilités de secrétaire national du parti socialiste aux relations internationales, pour les laisser à Pierre Moscovici. C’était un moment un peu compliqué par rapport à tout mon engagement. Mais ce qui était fait, ce qui était demandé alors c’était de valider toute cette dérive de la construction européenne depuis quelques années. Or moi, je pense au contraire que l’Europe reste remplie de possibilités à condition de retrouver ce qu’elle a perdu et qu’elle redevienne ce qu’elle était : une communauté de communautés ; une communauté de nations qui sont elles-mêmes des communautés de communautés ; avec une circulation de sève. Non pas une Union qui est une addition d’intérêts particuliers, avec des négociations de compromis, mais une dynamique biologique, une dynamique politique. Elle part de la base ; elle va jusqu’à l’Europe. Et bien, c’est ce que nous devons bâtir aujourd’hui.

C’est ce que nous allons faire et que nous allons construire dans l’année qui vient à partir de toutes les idées, de toutes les intuitions, de toutes les contradictions que nous avons aujourd’hui posé sur la table. Et nous allons le faire dans une méthode qui justement ne va pas être une méthode verticale, mais une méthode densification, de travail collectif.

2018 : avec des conventions, un travail dans les territoires

Nous allons, à partir du travail qui a été réalisé au long de ces deux jours, organiser ensemble plusieurs conventions thématiques qui vont être décentralisées dans les territoires. Elles vont être des moments où nous allons aller à la rencontre de l’économie, de l’entreprise, de la santé, du social de l’agriculture, de la biodiversité, de tout ce qui construit comme projets sur les territoires, de toutes les failles aussi, de toutes les faiblesses.

Nous allons vous demander de vous engager dans chacune de vos grandes régions, si vous le souhaitez, autour de nos délégués régionaux qui sont le relais, autour de chacun de ces thèmes de convention et de devenir, sur le thème que vous appréciez, ambassadeur thématique ; c’est-à-dire d’être celui ou celle qui va aller sur le territoire, animer un travail de recherche, de contact, de lien. Travail qui ne va pas aller vers une convention où l’on va donner la vérité révélée sur chaque problème, mais qui va permettre, au travers chaque convention, d’avoir des points relais, de manière permanente, avant, après et au-delà de chacune de ces conventions.

Nous allons nourrir ainsi jusqu’à la fin de l’année 2018 un projet dense mais bien articulé sur ces trois piliers : écologie humaine, économie de la réciprocité, méthode de communautés de projet, contre les communautarismes.

Avec la construction en parallèle d’une « internationale personnaliste » qui va nous permettre de poser notre démarche tout de suite dans une réalité partagée avec le monde.

Ce travail, il sera fait en liaison avec des experts, parce que nous ne récusons pas l’expertise ; mais nous allons relier en permanence un collège d’experts avec ce travail que nous allons faire sur les territoires ensemble : avec des webinars, des web-conférences, des experts qui vont descendre avec vous par exemple dans des hôpitaux pour rencontrer des aides-soignantes, pour aller dans des maisons de retraite pour voir comment se traite le problème des générations, dans les entreprises.

Nous allons faire ce travail non sans difficultés, parce que nous sommes tous des non professionnels de la politique, donc nous avons nos familles, des engagements. Mais nous allons le faire parce qu’il y a une nécessité toute particulière de servir qui se dessine tout au long de l’année 2018, en espérant, en ayant la volonté début 2019 d’aller vers un projet global : la dernière convention en janvier 2019 portera sur le thème « local, nation, Europe ». Parce que tout l’enjeu de ce travail de mise en maillage de ces communautés, c’est justement de briser ce qui depuis vingt ans au moins casse tout projet politique : l’idée que l’extérieur nous empêche de prendre notre responsabilité, nous empêche de nous engager.

Et donc, cette dernière convention, elle va démontrer qu’à condition de créer une nouvelle dynamique, à condition ainsi que l’a dit Jean Vanier « de libérer toutes les petites lumières » qui sont dans la société, dans les communautés, et dans les êtres, nous aurons une puissance qu’il ne sera pas possible d’arrêter.

Sommes-nous de gauche ou de droite ? Sommes-nous dans l’opposition ?

La question donc n’est pas de savoir aujourd’hui si nous sommes de gauche ou de droite ; car ces références ont évolué et ont changé. Sur notre fermeté et notre préalable sur la solidité de la société, nous sommes de droite. Sur notre exigence de justice sociale et de changement de l’entreprise nous serions de gauche. Sur notre volonté entrepreneuriale, on pourrait nous dire que… Peu importe ! Ces repères sont en train de changer, le monde vers lequel nous allons se bouleverse ; nous sommes dans une autre période.

De la même manière, sommes-nous dans l’opposition ? Oui, mais pas dans une opposition à une personne, même pas à un gouvernement ou un pouvoir. Nous sommes en opposition à un système, à des sphères qui sont en train de se mettre en place, qui échappent à peu près à tous les pouvoirs, et qui les instrumentalisent. Là, cette opposition, elle doit être intraitable.

Mais nous vivons en France : de manière maligne, une atmosphère d’hystérisassions (mais pas seulement en France) sert ces systèmes, parce qu’elle déchire les gens entre eux. Refondation devra être un lieu intraitable d’opposition, mais à la fois aussi un lieu d’accueil, de patience, et de construction. Ce chemin, cette porte, sont extrêmement étroits et cela appelle une fermeté morale, une fermeté intellectuelle, une immense modestie face à l’enjeu, et surtout que nous restions dans un collectif.

Personnalistes déjà et d’abord dans l’organisation de notre propre mouvement

Nous sommes personnalistes, et personnalistes nous devons l’être d’abord dans l’organisation de ce mouvement. Dans l’organisation des relations internes, et notamment certains d’entre nous qui ont déjà fait de la politique, nous savons que l’on peut être très vite pris dans un système ; je l’ai vécu, d’autre ici l’ont vécu. Ici, il ne doit pas y avoir de rêves de pouvoir, de rêves de mandat, de rêves d’égo. Non pas parce que ce n’est pas bien d’avoir des rêves ; bien au contraire. Mais tout simplement parce que les souffrances et les attentes dans ce monde sont considérables : cette solitude souffrante diffuse (y compris pour les hommes et les femmes politiques, car je n’ai pas beaucoup connu d’hommes politiques heureux) doit être renversée.

Et si nous ne renversons pas les choses en nous même dans la manière dont nous allons construire notre propre mouvement, il est clair que nous ne pourrons pas conduire un changement dans la société pour installer cette paix créatrice, cette fécondité, que nous voulons voir naître, diffuser, faire rayonner.

Donc, notre attitude, notre comportement, la forme de notre engagement, c’est peut-être le premier levier de la réussite de notre parti, qui a vocation non pas à être poil à gratter, même si nous sommes une avant-garde aujourd’hui, non pas à être un cri, mais à être une force de changement majoritaire.

Vous voyez bien que dans l’échiquier politique qui est en place, ce qui tient le plus à cœur au français, cette soif d’un autre chemin, ne trouve aucune réponse, d’aucune traduction, ne fait l’objet d’aucune proposition. Notre responsabilité, votre responsabilité, comme petite avant-garde aujourd’hui, est donc essentielle.

Nous n’allons pas aller vers de grands médias : nous allons commencer par une méthode différente : des conventions dans les territoires, les réseaux sociaux, la presse quotidienne régionale, et puis votre lien à vous dans tous les territoires dans lesquels vous êtes. Il y a beaucoup de gens qui viennent de province aujourd’hui, à peu près aujourd’hui 3 à 4 personnes sur 10, et c’est déjà en soi, à partir de cette journée, une chance et une porte ouverte sur des choses tout à fait différentes dans notre construction.

Il faut bien vous dire, nous avons été environ entre 280 et 300 au long de ces journées (nb : en fait au pointage final, près de 400 !). Tout l’enjeu à présent, c’est d’être capable d’aller passer ce message et de créer un entraînement, de le formaliser, de le simplifier, de le porter, et de le transformer en propositions concrètes et réalistes, concrètes et réalisables, et de témoigner de notre expérience pour le faire.

Alors, voilà : cette page s’ouvre.

Il nous faut remercier tous ceux qui ont contribué à cette journée.

Ce qui s’est passé déjà dans la manière dont cet évènement a été construit est révélateur d’une unité et d’un état d’esprit qui, si nous les conservons, va nous permettre d’être des vrais témoins de l’avenir.

Merci !